Mais Poesia

Le Nuage en Pantalon

Votre pensée,
qui rêvasse sur votre cervelle ramollie,
tel un laquais obèse sur sa banquette graisseuse,
je m'en vais l'agacer
d'une loque de mon coeur sanguinolent
et me repaître à vous persifler, insolent et
caustique.

Mon âme n'as pas pris un seul cheveu blanc,
et il n'y a en elle aucune tendresse sénile!
Enfracassant le monde par le bourdon de ma voix,
je m'avance, beau gosse, mes vingt-deux ans en
prime.

Tendres!
Vous couchez l'amour sur les violons.
Les brutaux le flanquent sur les cymbales.
Mais sauriez-vous comme moi vous retourner
comme un gant
pour que vous ne soyez plus que des lèvres
Intégrales?

Venez prendre des leçons
- salonnière de satin,
fonctionnaire formatée de la ligue angélique,
et celle qui feuilltte des lèvres sans émoi aucun,
comme si c'étaient les pages d'un livre de cuisine!

Voulez-vous
que je sois un enragé de la viande,
ou bien, changeant de ton comme des couleurs
du ciel-
voulez-vous
que je sois impeccablement tendre,
un nuage en pantalon au lieu d'un homme
charnel?

Ce n'est pas vrai qu'il y ait une Nice florale!
Voilà que je me remets à chanter vous louanges
- vous, hommes, défraîchis comme un hôpital,
et vous femmes, rebattues comme un proverbe.


Maïakovski, LeNuage en Pantalon, (Paris, Éditions Mille et une nuits, 1998), pp.7-8.

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