"Take this Waltz" VII - Oripeaux

Mais vous avez tourné la page, écarté doucement le rideau froid de l'apparence, et je vais naître au monde; il suffit d'un regard. (...)Et vous écartez le rideau. Votre soif secrète et la doceur de votre main ont tourné la première page, et commencé l'histoire d'une personnage différent. (...)L'enfance règne au coeur du cercle d'eau. Les grands se désaltèrent à regarder le sillage léger des rêves qui voyagent. Sur les chaises blanches, on s'assoit bord à bord quand on est amoreux, en face du soleil ou bien à contre-jour pour ne rien perdre du spectacle.
Philiphe Delerm, Le Buveur de Temps,
(Paris, Gallimard, 2002), pp.11, 13, 31.


Gare de Locarno

Le train de Zurich arrive. Il est là.
Quoi dire?

-Bonjour monsieur le photographe!
-Ma chère Klein, vous ici ?
-Je prétends psychanalyser les vins du Ticino ... qu’elle belle voyage, les paysages, les gens, et maintenant toi!

Ils s’embrassent en riant. Les yeux dans les yeux regardent la chair des rêves

- Il faut chercher un hôtel … pour se libérer des sacs, prendre un bain …

- Surprise ! On va se loger chez un ami à Orselina, il vive à Luzern et nous offre l'ancienne maison pendant une semaine. Sa maison est très belle et confortable, décoré d’antiques, des jolis meubles, photos, broderies, dentelles et linges qui appartenait à sa mère. De la terrasse, des vérandas, des fenêtres, il y des vues magnifiques vers le lac ... tu aimeras ... On peut se promener dans les forêts.

- Superbe !!

- Tu prendras des photos, et moi je goûterais des " cannoncini", des "tranches di lamponi", des "tortas" ...

- Tu ressembles un enfant à la phase oral ... mais je t'offrirais de plus voluptueux plaisirs...
- C’est mon plus cher désir ...


Ils regardent le lac par la fenêtre.

- Les bateaux me rappelle des amours passés...

- Est-il seulement possible de penser à quelqu’un au passé ? Tant que nous sommes aimés nous sommes attachés à l’instant, on ne permet que le plus infime de nous émotions reste en arrière ...

- Peut-être, je me souviens que j’étais capable de foudroyantes, bien qu’éphémères passions. J’ai connu Bernard pendant les vacances de Pâques à Horta. On sortait ensemble pour dîner, écouter de la musique, se promener.
Une nuit il m’a dit des mots d’amour, je suis resté indifférente. Je ne l’aimais pas.
Mais, le matin suivant quand on se promenait sur le port, je me suis enivré de lumière, ses yeux réfléchissait le bleu profond de la mer et les voiles des yachts. Ce moment fut extraordinaire. J’étais là immobile et plongé dans un extase. Au sein même de cet état quelque chose de nouveau venait d’apparaître, je me suis transporté par cette ivresse, à ce moment là, je l’ai passionnément aimé. Deux mois après je ne l’aimais plus.
Ce n’était ni la première, ni la dernière fois que ...

Elle détourne la tête. Il soulève un peu son verre mais il ne songe pas à boire, il cligne les yeux d’air surpris et intimité.

- Ne dis plus rien, je cherche un amour implacable et sans ombres.

Elle le regard fièrement encore toute surprise.
-Calmes toi, je ne regrette rien, mes souvenires sont comme ces rideaux: des oripeaux.

Il fait gris le soleil se couche, la pénombre envahit la salle, une faible clarité barbouillé d’orange tombe, une bouffée d’air glacé la fait frissoner. Penché sur Elle, Il lui embrasse, la main se met à descendre le long de la robe.

- Quelle large baignoire, il faut en proffitter ...
Ils roulent ensemble sous l'eau, éclaboussant la salle de bain, l’eau coulle partout.

Elle repose sur le dos détendue, Elle a la nudité d’une femme de Modigliani.

À suivre (?)

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