Confidências e Desabafos de Savarin (15)
Agora que acabaram as festas não resisti a transcrever esta introdução de Arnaud Malgorn, em Recettes Littéraires, Pâtisseries, entremets, confiseries, (Paris, Mercure de France, 1998), pp. 9-10
" Carême, dit-on, ne portait pas Brillat-Savarin dans son cceur. Petitesse des hommes de métier pour les hommes de plume ! "
Robert J. COURTINE
Au cours d'une scène de repas, l'écrivain trouve pleinement matière à explorer ses personnages et leur environnement. Son regard (faut-il s'en étonner?) n'a rien de sucré, il est assez pessimiste.
Principale figure littéraire du repas : l'initiation, comme s'il s'agissait d'assimiler physiquement un rite. Cette initiation prend plusieurs formes. Elle enseigne un savoir cabalistique, chez le romancier israélien Meir Shalev; elle donne accès à un monde nouveau et interdit, grâce aux fondants au haschisch d' Alice
Toklas. Plus profondément, elle permet de communier, pour ces poetes maudits réunis autour de Cyrano... Légere et grave, cette initiation aux secrets de la vie est toujours une évocation de la mort.
Principal protagoniste du repas : la famille. La nourriture y devient prétexte à exposer des sentiments complexes, violents, voire contradictoires, comme les torrejas de Laura Esquivei. La famille, dont Christine Pascal nous a laissé un émouvant portrait, semble avoir pour seul espoir de se recomposer l'espace d'un instant, autour d'une flamme. Le repas conjugal est le lieu de toutes les incompréhensions, qui seraient pathétiques, si elles n'étaient seulement dérisoires, vues par Alphonse Allais.
Le repas en société est une amplification de ce thème de l'échange impossible. S'il est mondain, il s'agit avant tout de briller. Mallarmé aide ainsi les lectrices de sa gazette à se faire valoir par le raffinement et l'originalité de leurs mets et de leurs mots. Ou bien le dialogue y est politique, comme chez l'écrivain Lezama Lima qui, mettant en boite ses invités avec des ananas en conserve, délivre un message sur la société coloniale cubaine, ou du moins ce qu'il en reste, après importation.
Que reste-t-il du caractere festif du repas? Les fêtes ponctuent l'existence pour en marquer à la fois la continuité et le perpétuel renouvellement. Une fête sans repas menacerait l'écoulement du temps. Mere Barberin l'a compris, qui déploie un trésor d'ingéniosité pour que Rémi Sans famiIle fête dignement Mardi gras.
Comme l'a résumé Jean-Paul Aron (Le Mangeur au XIX" siecle), la représentation du repas dans la littérature a évolué à l'instar du statut de l'artiste dans la société : " À table, les écrivains ont trouvé d'abord un divertissement et un drame, puis apres 1850, lorsqu'ils sont proscrits par les notables, un lieu de communion. " Ce qui était vrai encare chez Rostand ne l'est déjà plus au coeur du xx' siecle. Et on ne peut être que frappé par l'abondance des simulacres (Simmel) ou simplement de repas solitaires (Malot, Pascal) dans la littérature contemporaine.
Arnaud Malgorn, Recettes Littéraires, Pâtisseries, entremets, confiseries, (Paris, Mercure de France, 1998), pp. 9-10
Agora que acabaram as festas não resisti a transcrever esta introdução de Arnaud Malgorn, em Recettes Littéraires, Pâtisseries, entremets, confiseries, (Paris, Mercure de France, 1998), pp. 9-10
" Carême, dit-on, ne portait pas Brillat-Savarin dans son cceur. Petitesse des hommes de métier pour les hommes de plume ! "
Robert J. COURTINE
Au cours d'une scène de repas, l'écrivain trouve pleinement matière à explorer ses personnages et leur environnement. Son regard (faut-il s'en étonner?) n'a rien de sucré, il est assez pessimiste.
Principale figure littéraire du repas : l'initiation, comme s'il s'agissait d'assimiler physiquement un rite. Cette initiation prend plusieurs formes. Elle enseigne un savoir cabalistique, chez le romancier israélien Meir Shalev; elle donne accès à un monde nouveau et interdit, grâce aux fondants au haschisch d' Alice
Toklas. Plus profondément, elle permet de communier, pour ces poetes maudits réunis autour de Cyrano... Légere et grave, cette initiation aux secrets de la vie est toujours une évocation de la mort.
Principal protagoniste du repas : la famille. La nourriture y devient prétexte à exposer des sentiments complexes, violents, voire contradictoires, comme les torrejas de Laura Esquivei. La famille, dont Christine Pascal nous a laissé un émouvant portrait, semble avoir pour seul espoir de se recomposer l'espace d'un instant, autour d'une flamme. Le repas conjugal est le lieu de toutes les incompréhensions, qui seraient pathétiques, si elles n'étaient seulement dérisoires, vues par Alphonse Allais.
Le repas en société est une amplification de ce thème de l'échange impossible. S'il est mondain, il s'agit avant tout de briller. Mallarmé aide ainsi les lectrices de sa gazette à se faire valoir par le raffinement et l'originalité de leurs mets et de leurs mots. Ou bien le dialogue y est politique, comme chez l'écrivain Lezama Lima qui, mettant en boite ses invités avec des ananas en conserve, délivre un message sur la société coloniale cubaine, ou du moins ce qu'il en reste, après importation.
Que reste-t-il du caractere festif du repas? Les fêtes ponctuent l'existence pour en marquer à la fois la continuité et le perpétuel renouvellement. Une fête sans repas menacerait l'écoulement du temps. Mere Barberin l'a compris, qui déploie un trésor d'ingéniosité pour que Rémi Sans famiIle fête dignement Mardi gras.
Comme l'a résumé Jean-Paul Aron (Le Mangeur au XIX" siecle), la représentation du repas dans la littérature a évolué à l'instar du statut de l'artiste dans la société : " À table, les écrivains ont trouvé d'abord un divertissement et un drame, puis apres 1850, lorsqu'ils sont proscrits par les notables, un lieu de communion. " Ce qui était vrai encare chez Rostand ne l'est déjà plus au coeur du xx' siecle. Et on ne peut être que frappé par l'abondance des simulacres (Simmel) ou simplement de repas solitaires (Malot, Pascal) dans la littérature contemporaine.
Arnaud Malgorn, Recettes Littéraires, Pâtisseries, entremets, confiseries, (Paris, Mercure de France, 1998), pp. 9-10
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